Droit de la famille : vos questions ?… Nos réponses
► Je suis en couple, marié depuis cinq ans sous le régime de la séparation de biens, et mon compagnon m’a demandé de participer à la construction d’une maison sur un terrain qu’il avait acquis par héritage. J’ai donc financé une partie de la construction. Aujourd’hui, je me sépare de lui, et je souhaite obtenir le remboursement des sommes que j’ai investies dans la construction. Est-ce que cela est possible ?
Depuis l’arrêt du 5 avril 2023, de la Cour de cassation (Cass 1ere civil, 5 avril 2023, numéro 21–22. 296. Jurisdata 2023 005009) un remboursement est envisageable sous condition, pour les couples mariés sous le régime de la séparation de biens.
En effet, la cour de cassation est venue préciser : « sauf convention contraire, des époux, l’apport en capital de fonds personnels, réalisé par un époux séparé de biens, pour financer l’amélioration, par voie de construction, d’un bien personnel, appartenant à l’autre, et affecté à l’usage familial, ne participe pas à l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage. »
Il sera donc possible pour cet époux séparé de biens d’obtenir remboursement des sommes investies pour l’amélioration par voie de construction du bien personnel de son conjoint affecté à l’usage familial.
Les conditions sont strictes :
- Une amélioration
- Par voie de construction
- D’un bien personnel affecté à l’usage familial
- Par un époux séparé de biens
Cela veut bien dire que tout investissement lambda au profit de son conjoint ne peut pas donner lieu à un remboursement.
En effet, un investissement lambda peut être considéré comme une contribution normale aux charges du mariage.
Il convient en effet de rappeler que pour remédier aux inconvénients du régime de la séparation de biens, la cour de cassation a eu l’idée en mai 2013 d’user de la notion de « contribution aux charges du mariage ».
Ainsi, un époux, même séparé de biens, qui a remboursé l’emprunt bancaire réalisé pour l’acquisition d’un bien immobilier de son conjoint ne dispose pas de la possibilité de recouvrer sa créance contre son conjoint en raison d’une contribution inégale. L’article 214 du Code civil est employé pour dénier à cet époux sa créance.
Il en est de même pour les partenaires de pacs via l’article 515-4 du Code civil qui prévoit :
« Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à une vie commune, ainsi qu’à une aide matérielle et une assistance réciproques. Si les partenaires n’en disposent autrement, l’aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives. »
Il en est encore de même pour les concubins, non pas au nom de la loi, car aucune disposition légale ne prévoit une contribution aux charges de La Famille, mais au nom de la jurisprudence (cour de cassation du 13 janvier 2016, numéro 14–29-746)
Des solutions communes aux différents régimes (séparation de biens, PACS, concubinage) commencent donc à apparaître.
Selon Monsieur Marc Nicod, Professeur à la faculté de droit de l’Université de Toulouse, Capitole , qui a publié un excellent article « Petit exercice de liquidation conjugale, comparée » dans la revue droit de la famille, revue Lexis Nexis de juin 2023, la solution dégagée par la cour de cassation dans son arrêt du 5 avril 2023, devrait être étendue sans difficulté aux concubins et aux partenaires de PACS.
Mais attention car la jurisprudence évolue chaque jour. Il est donc peut être préférable de prêter de l’argent avec une reconnaissance de dette en bonne et due forme plutôt que d’investir directement dans le bien de son conjoint.
Pour les couples mariés sous le régime de la communauté, tout est encore différent …